Écriture inclusive : la féminisation de l’écriture fait débat

Écriture inclusive : la féminisation de l’écriture fait débat

À grand renfort de parenthèses, tirets, points médians, inventions lexicales, synonymes, doublons et autres formules englobantes, l’écriture inclusive s’efforce de rendre notre langue plus égalitaire. Si certains (ou certaines !) accueillent cette mouvance comme le signe d’une France qui tend vers davantage de parité, d’autres la condamnent au contraire pour sa complexité, qui poserait un frein à l’écriture et à la lecture. Même les linguistes ne semblent pas pouvoir tomber d’accord. Pourquoi l’écriture épicène (ou inclusive) est-elle si controversée ? Comme savoir s’il faut l’utiliser ou pas ? On fait le point.

L’écriture inclusive : un débat qui remonte à loin

Le Larousse de la langue française définit l’écriture inclusive, que l’on nomme également « écriture épicène », comme « l’ensemble des conventions graphiques et syntaxiques visant à promouvoir une égalité de représentation entre les hommes et les femmes dans la grammaire française ». Elle incarne ainsi le contrepoint de la formule tant répétée lors de nos cours de français. Et si le masculin ne devait plus l’emporter sur le féminin ?

L’idée n’est pas nouvelle. Elle remonte aux années 70, durant lesquelles les actions des militantes féministes ont fait prendre conscience de l’absence de féminisation qui s’était installée parmi les noms de métiers. Force est de constater que la question incite à la réflexion, puisque l’Académie française a tranché en 1984 en faveur de l’utilisation de la forme féminine lorsque le contexte s’y prêtait. Le masculin devait cependant continuer à primer dans un contexte neutre. L’objectif semblait être de vouloir contenter le plus grand nombre, sans pour autant céder à une « féminisation systématique » de la langue française.

L’Académie française a d’ailleurs cimenté cette prise de position quand, en 2017, elle s’est insurgée contre la parution d’un manuel de CE2 rédigé en écriture inclusive.

Pourquoi une telle controverse autour de l’écriture inclusive ?

Si l’on voit souvent l’écriture inclusive prendre la forme d’un « (e) » bien placé ou d’une juxtaposition de deux formes (ex. : « les clientes et clients »), ce sont les points médians qui génèrent visiblement le plus de réserves. En effet, écrire que nous pouvons « tou.te.s » nous réjouir de cette évolution des mentalités ne semble pas convaincre celles et ceux qui craignent que cette pratique impacte négativement la lisibilité et l’accessibilité. La Fédération française des DYS et l’Association handicap, par exemple, trouvent que le point médian peut créer une confusion chez le lecteur débutant.

Par ailleurs, ces graphies ne possèdent aucun équivalent oral généralement observé. Lorsqu’on s’efforce de s’exprimer de manière inclusive, la tendance reste naturellement de préciser les deux formes, à la manière du « Mesdames et Messieurs » habituel. À l’écrit, le point médian ne jouit d’ailleurs pas de règles fixes. Même les défenseurs de l’écriture épicène admettent qu’en l’état, celle-ci s’apparente davantage à une série d’expérimentations, dont il résulte une certaine confusion. Quant aux logiciels de synthèse vocale, il leur est pour le moment impossible de retranscrire le point médian.

Et pourtant, la volonté d’écrire un français plus égalitaire se fait sentir dans différents domaines. Sur la toile, en particulier, les sites sont de plus en plus nombreux à sauter le pas.

L’écriture inclusive sur le web : faut-il l’employer ou l’éviter ?

L’écriture pour le web possède ses propres codes. Et si Internet se prête volontiers à des pratiques rédactionnelles plus novatrices que celles que l’Académie française prescrit, le référencement naturel, quant à lui, y règne en seigneur et maître. Or, si la rédaction épicène a le mérite de remédier au caractère intrinsèquement sexiste de notre langue, la confusion que certaines de ses formes créent affecte également les moteurs de recherche.

Les résultats de Google, nous le savons, dépendent en grande partie des mots-clés. Bien qu’il soit désormais capable d’en reconnaître les signes, on remarque que l’algorithme ne fusionne pas (encore) les résultats des requêtes inclusives avec leur équivalent « traditionnel ». Et pour cause : les internautes n’ont, pour la grande majorité, pas le réflexe d’effectuer des recherches dégenrées.

Cependant, il serait dommage de se priver du message fort que l’écriture inclusive permet de faire passer. Dans un contexte où même l’éducation nationale continue à refuser la parité langagière, se positionner en faveur d’un monde plus égalitaire fait montre d’un esprit engagé.

Comment adapter l’écriture inclusive au digital ?

Si vous souhaitez employer l’écriture inclusive sans devoir craindre des répercussions négatives sur votre SEO, il existe des moyens subtils pour écrire de manière plus égalitaire.

Mieux vaut pour le moment se garder d’user des formes modifiées dans les balises titres, où les mots-clés doivent apparaître aussi clairement que possible. Si vous voulez prendre explicitement position en employant le point médian, cantonnez-le au corps de texte. Notez cependant qu’une quantité trop importante d’expressions « alourdies » rend parfois les textes indigestes. Pour éviter tout risque de saturation, travaillez vos tournures de phrases dans le sens de la neutralité. Ainsi, les « participant.e.s » peuvent devenir « les personnes présentes » ou « l’assistance » et « les consultantes et consultants en référencement » se muer en « les spécialistes du référencement ». Cette habitude vous permettra de mieux doser votre emploi de l’écriture inclusive pour un impact décuplé.

L’écriture inclusive ou non : comment choisir ?

L’écriture épicène est avant tout une question de conviction personnelle et c’est notamment pour cette raison que la controverse persiste. La pratique n’étant pas officialisée, il vous appartient d’employer l’écriture inclusive de manière assumée, à travers un jeu rédactionnel aussi habile qu’invisible… ou pas du tout. Dans le monde digital, les habitudes langagières des pages web, mais également les recherches effectuées par les internautes font évoluer les algorithmes. Cette mutation permanente implique que ceux qui ont raison d’éviter l’écriture inclusive aujourd’hui auront peut-être tort demain, sans que la logique elle-même ait changé. Reste votre volonté de prendre position et d’accorder vos textes à votre culture d’entreprise, ainsi qu’à l’image que vous souhaitez donner à votre marque. Enfin, considérez votre clientèle, votre lectorat et vos cibles et vous saurez de quel côté du débat vous devrez pencher.