À la faveur d’une adoption record, l’intelligence artificielle a conquis des centaines de millions de personnes dans le monde. Pourtant, cette effervescence masque un paradoxe : la rentabilité ne suit pas, et les entreprises peinent à convertir l’engouement en revenus solides.
Une explosion d’usages sans décollage financier
Selon le rapport “2025: The State of Consumer AI” de Menlo Ventures, relayé par ZDNet, près de deux milliards de personnes auraient déjà utilisé des outils IA, dont 600 millions au quotidien. Aux États-Unis, 61 % des adultes déclarent avoir testé ces technologies dans les six derniers mois, et près d’un sur cinq s’en sert chaque jour. Mais malgré cette popularité mondiale, les recettes générées plafonneraient à seulement 12 milliards de dollars par an. Un chiffre modeste face aux investissements colossaux nécessaires pour faire tourner des modèles gourmands en calculs et en énergie.
La gratuité généralisée, un piège pour la rentabilité
Menlo Ventures souligne un écart inédit entre la popularité des outils et leur capacité à générer des revenus. Seuls 3 % environ des utilisateurs paieraient pour accéder aux fonctionnalités premium. La majorité se contente d’explorer les versions gratuites ou allégées. Cette stratégie de diffusion massive, basée sur l’accès libre, a permis aux géants du secteur de s’imposer dans le quotidien des internautes, mais elle pèse lourd sur les finances en limitant la conversion des audiences en abonnements payants.
Le cas de ChatGPT en est l’exemple emblématique : malgré 800 millions d’utilisateurs mensuels, la proportion d’abonnés payants à l’offre premium reste faible, estimée entre 3 et 5 %. Une dynamique qui illustre la difficulté à transformer une curiosité généralisée en source de revenus récurrents.
La créativité comme principal moteur de monétisation
Il existe cependant un domaine où l’IA parvient à séduire les portefeuilles : la création numérique. Générateurs d’images, modules audio, outils de montage vidéo… Lorsque l’IA offre aux internautes la possibilité de produire des contenus originaux, l’appétence pour les formules payantes augmente nettement. Selon le rapport, plusieurs éditeurs spécialisés dans la génération de contenus créatifs connaissent déjà une croissance rapide de leurs revenus grâce à cette tendance.
Cette propension à investir s’explique par la valeur ajoutée perçue : les utilisateurs sont enclins à payer pour des expériences qui dépassent l’usage utilitaire, avec un contrôle précis sur la qualité et la personnalisation des créations.
Millennials et parents en première ligne
Le profil des utilisateurs les plus assidus réserve une surprise : ce sont principalement les Millennials qui exploitent l’IA au quotidien, devant la Génération Z. Ces trentenaires et quarantenaires, souvent à la croisée de la vie professionnelle et familiale, apparaissent comme les moteurs de l’adoption. Par ailleurs, les parents affichent un usage bien plus intensif (79 %) que les non-parents (54 %), soulignant l’intérêt pour des solutions permettant de gérer plus efficacement les contraintes du quotidien.
Un modèle économique à réinventer
Malgré une audience planétaire, le secteur de l’IA grand public n’a pas encore trouvé la recette du succès financier. Le rapport de Menlo Ventures insiste sur la nécessité d’innover, notamment en imaginant des offres hybrides qui incitent les utilisateurs à passer d’une expérimentation occasionnelle à un usage régulier, véritable clé pour générer une monétisation durable.
L’industrie est donc à la croisée des chemins : sans modèle viable, la généralisation de l’intelligence artificielle pourrait rester un exploit technique sans réels retours économiques. Pour transformer la fascination en prospérité, il faudra convaincre les internautes que l’IA n’est pas seulement un gadget, mais un compagnon indispensable du quotidien.