Sous pression de la Commission européenne, la plateforme doit prouver qu’elle peut jouer selon les règles, au risque de payer très cher.
Bruxelles dégaine le DSA, TikTok sur la sellette
Nouveau coup de chaud pour TikTok. L’application star des jeunes générations, moteur de tendances et aimant à annonceurs, se retrouve sous le feu des projecteurs… pour de mauvaises raisons. La Commission européenne soupçonne la plateforme de ne pas respecter les obligations de transparence imposées par le Digital Services Act (DSA), un texte qui redéfinit les règles du jeu pour les géants du numérique opérant en Europe.
En ligne de mire : l’opacité de son registre publicitaire, censé lister précisément le contenu des publicités, les annonceurs derrière les campagnes, ainsi que les paramètres de ciblage employés. Autrement dit, un outil conçu pour sortir de l’ombre les mécaniques de l’influence en ligne.
Un cadre européen qui ne laisse plus de place à l’improvisation
Avec le DSA, l’UE entend reprendre la main sur les flux d’information numérique, en imposant une transparence accrue aux plus grandes plateformes. Pour TikTok, comme pour Meta, X ou Google, cela signifie une série d’obligations strictes : audit des algorithmes, modération renforcée, traçabilité des contenus sponsorisés.
L’enjeu n’est pas qu’administratif. Ce registre permet aux chercheurs, ONG et journalistes de détecter les campagnes de désinformation ou de manipulation électorale, un sujet d’autant plus sensible que plusieurs scrutins majeurs se profilent en Europe.
Une défense mesurée, mais des doutes persistants
TikTok a rapidement réagi. Dans une déclaration officielle, la plateforme assure soutenir les objectifs du DSA et promet des améliorations imminentes sur la transparence publicitaire. Mais pour l’instant, aucune mesure concrète n’a encore été rendue publique, et la confiance reste fragile.
Et pour cause : avec plus de 16 milliards de dollars de revenus générés en 2023, majoritairement issus de la publicité, TikTok a beaucoup à perdre. Le DSA prévoit des sanctions pouvant atteindre 6 % du chiffre d’affaires mondial en cas de non-conformité. La menace est donc réelle, et potentiellement lourde.
Des règles taillées pour l’ère des élections numériques
Cette affaire ne tombe pas par hasard. Alors que plusieurs pays de l’Union s’apprêtent à voter, les craintes d’ingérence ou de manipulation via les réseaux sociaux sont plus vives que jamais. Or, TikTok, dont les formats courts et viraux se prêtent bien à la diffusion rapide de contenus, est devenu un terrain fertile pour toutes sortes de campagnes, licites comme illicites.
C’est dans ce climat de vigilance accrue que les régulateurs européens veulent s’assurer que la plateforme ne soit pas un angle mort du débat démocratique. Un faux pas de TikTok pourrait avoir des répercussions bien au-delà de sa réputation.
Une pression qui dépasse le seul cas TikTok
Si la plateforme de ByteDance est aujourd’hui dans la ligne de mire, elle est loin d’être la seule. Meta, X, YouTube… tous les géants sont désormais tenus de rendre des comptes, et le DSA marque un tournant dans l’approche européenne du numérique : celle d’un contrôle actif et assumé des acteurs dominants.
Pour TikTok, ce n’est pas juste une mise en garde. C’est un test grandeur nature de sa capacité à respecter des règles européennes strictes, sans ralentir son ascension fulgurante.
Une équation complexe pour l’avenir
Rester fidèle à sa promesse d’une créativité sans limites tout en répondant aux exigences d’un régulateur de plus en plus intrusif : c’est le casse-tête auquel TikTok doit désormais faire face.
Comment réconcilier viralité et conformité, croissance et transparence ? La réponse déterminera si TikTok peut encore grandir sur le Vieux Continent ou s’il devra revoir sa copie pour éviter l’amende et la défiance durable des institutions.